Le cabinet INDDIGO ALTERMODAL a présenté, le 24 février dernier, aux élus du SYMBORD et à des représentants du Collectif PARFER LYON <=> CREMIEU une synthèse de ses dernières études sur la mobilité dans le Nord Isère et le support de cette étude est téléchargeable sur le site du SYMBORD.
Ce complément d’études a été mené en fonction des orientations prises lors du Forum Mobilité dans le Nord Isère du 20 novembre et selon les décisions prises lors du comité de pilotage du 22 décembre. Pour le projet de liaison en site propre de LYON à CREMIEU sur l’emprise du CFEL, objet du présent article, ces études complémentaires visaient à approfondir sa faisabilité technique et financière, avec l’analyse d’une solution tram et d’une solution Bus à Haut Niveau de Service (BHNS).
La solution BHNS a été peu développée dans cette étude et les éléments principaux que nous avons notés, hormis bien sûr un coût plus faible, sont les suivants :
- Une fréquentation inférieure de 33 % à celle de la solution tram (le cabinet Transétudes estimait même en 2007 que la fréquentation avec des bus en site propre serait seulement la moitié de celle du tram)
- Une rupture de charge obligatoire à Meyzieu ZI
- Une interrogation sur l’intérêt d’utiliser l’emprise du CFEL sur toute sa longueur en fonction de la mise en place de la déviation de Janneyrias sur la RD 517 (quid de la ponctualité en cas d’embouteillage ou d’accident sur cette déviation)
- Une solution qui consisterait plutôt à « rabattre » plusieurs lignes express complémentaires sur Meyzieu ZI
Pour la solution tram, les éléments techniques principaux qui se dégagent de cette étude sont les suivants :
- L’utilisation du tram concernerait environ 42 000 habitants du territoire (population 2006), le reste de la population souhaitant utiliser un transport en commun en site propre (environ 15 000 habitants) ayant plutôt intérêt à aller prendre un TER sur Ambérieu ou sur la ligne Grenoble-Lyon.
- 2 options sont retenues en termes de terminus de la ligne : Tignieu Collège ou Crémieu Buisson Rond
- Il faudrait prévoir une rame toutes les 15 minutes en heures de pointe (6h-8h30 et 16h30-19h) et toutes les 30 minutes en heures creuses, avec un service fonctionnant de 6h à 21h : ce cadencement est tout à fait compatible avec les sillons actuels du tram T3. Seules seraient nécessaires quelques rames allongées (43 m de longueur au lieu de 32 m actuellement), ce qui est déjà prévu par le SYTRAL dès 2012 sur son réseau.
- Les temps de trajets porte à porte seraient inférieurs d’environ 20 minutes à ceux nécessaires actuellement avec le bus 1980. Ce temps serait par contre supérieur de 10 minutes à celui nécessaire en voiture (ruptures de charge pour prendre le tram et à l’arrivée sur Lyon)
- La fréquentation estimée varierait de 4 100 (terminus à Tignieu) à 5 000 passages (terminus à Buisson Rond) en prenant en compte la population du recensement 2006 et de 5 400 à 6 600 respectivement en prenant la population estimée en 2020 dans le SCOT. Ces fréquentations sont similaires à des projets de même nature existants ou en projet en France.
En ce qui concerne le volet financier, le cabinet d’études a examiné les 4 solutions suivantes classées par ordre dégressif de coûts annuels (frais de structure + frais d’exploitation de la ligne + annuités de remboursement de l’investissement) :
- Tram indépendant de T3 allant de Crémieu Buisson Rond à Meyzieu ZI : coûts annuels de 16,1 M€ pour un investissement total de 95 M€
- Tram indépendant de T3 allant de Tignieu à Meyzieu ZI : coûts annuels de 13,4 M€ pour un investissement total de 77 M€
- Tram prolongeant la ligne T3 au départ de Tignieu : coûts annuels de 10,9 M€ pour un investissement de 69 €
- Tram prolongeant la ligne T3 au départ de Tignieu, mais prise en compte d’un taux d’intérêt réduit (moins de 4 % au lieu du taux « classique » de 5,5 % retenu pour les 3 solutions précédentes), comme le permettent les prêts bonifiés de la Caisse des Dépôts et Consignation (CDC) : coûts annuels de 10 M€ pour un investissement de 69 M€
Il a aussi retenu plusieurs scénarios de recettes, mais pour faciliter la lecture, nous ne développons que les 2 indiqués ci-après qui nous semblent les plus pertinents, en prenant l’hypothèse d’un prolongement du tram T3 jusqu’à Tignieu et un taux d’intérêt réduit, à savoir :
-
1er scénario avec la population et les emplois de 2006 (dernière année avec des données complètes)
- Intégration de notre territoire en qui concerne le transport dans la future aire métropolitaine lyonnaise qui aura la compétence transport selon la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. Cette intégration permettrait de porter le taux du versement transport payée par les entreprises de 0,9 à 1,75 %
- Prise en compte d’une aide annuelle du Conseil Général de l’Isère en remplacement du financement de la ligne Transisère 1980 qui serait supprimée
- Prise en compte d’une aide de l’Etat dans le cadre des appels à projets de TCSP lancés suite au Grenelle de l’environnement
- Participation des communes du Rhône concernées par le prolongement du tram T3
- 2ème scénario avec la population et les emplois prévus en 2020 suivant les prévisions du SCOT de la Boucle du Rhône en Dauphiné et avec les mêmes hypothèses que pour le 1er scénario (l’augmentation de la population joue sur les recettes de billetterie et le nombre d’emplois joue sur le montant des versements transport)
Le tableau ci-dessous reprend le bilan financier complet de ces 2 scénarios :
Il montre que l’équilibre est atteint si on prend en compte le scénario N° 1 (prise en compte de la projection à 2020 de la population et du nombre d’emplois suivant les éléments du SCOT), et c’est une très bonne nouvelle qui vient contredire tous ceux qui annonçaient que ce projet allait amener une explosion des impôts.
Le déficit annuel annoncé de 1 596 k € du scénario N° 1 (population et emplois 2006) reste raisonnable (38 € par habitant en prenant les 42 000 personnes potentiellement concernées). Il pourrait à notre avis être ramené facilement à 0 si on prend en compte les éléments suivants :
- Une intégration dans l’aire métropolitaine lyonnaise pour les transports ferait jouer la solidarité entre les territoires concernés. Cette solidarité fait qu’un territoire ayant peu d’entreprises et donc peu de ressources n’est pas pénalisé par rapport aux autres. Il ne faut pas oublier non plus que les entreprises implantées dans le Grand Lyon payent actuellement au SYTRAL le versement transport proportionnellement à la masse salariale, y compris bien sûr pour tous les salariés du Nord Isère travaillant dans ces entreprises, et ils sont nombreux.
- Une partie de notre territoire est attractive d’un point de vue touristique pour les habitants du Rhône et pourrait le devenir de plus en plus avec un transport performant. Venir facilement de Lyon pour passer une journée sur le plateau de l’Isle Crémieu et profiter de sa nature ne peut que profiter à l’économie locale.
- L’augmentation inéluctable des prix des carburants va inciter de plus en plus d’habitants à prendre les transports en commun (l’étude met en évidence que de 40 à 50 % de la population de notre territoire est « vulnérable » : cette population de zone périurbaine qui a un budget transport très important se rabattra fortement sur un transport en commun s’il est efficace).
- La sensibilité de la population à la problématique de l’environnement et du changement climatique a augmenté depuis que l’enquête ménages déplacements a été menée en 2006 et elle devrait encore augmenter à l’avenir. Il devrait donc y avoir des fréquentations plus importantes du prolongement du tram que celle annoncées (cela a été démontré dans tous les projets de tram récents, tram T3 par exemple. Il en est de même de la fréquentation des TER qui augmente fortement et plus vite que celle de l’offre)
- Pourquoi attendre que la population et les emplois aient suffisamment augmenté pour lancer le projet alors qu’on sait que ce projet va inciter la population et les entreprises à venir s’installer sur notre territoire (il n’y a qu’à regarder l’explosion de l’installation des entreprises dans les zones situées près du terminus actuel de T3 et le rythme des constructions d’immeubles sur Décines et Meyzieu depuis sa mise en service).
- Les obligations de la DTA et du SCOT imposent d’éviter de continuer à éparpiller l’habitat (lutte contre le mitage des terres agricoles et nécessité de limiter l’explosion des coûts d’infrastructure associés à ces augmentations des surfaces dédiées à l’habitat). Le tram sera de ce point de vue structurant et l’habitat se développera naturellement près des gares (voir par exemple le projet de la ZAC du Piarday de Charvieu-Chavagneux).
Tous ces points amènent naturellement à la conclusion que ce projet, pour lequel il y a une forte demande, peut être économiquement viable à court terme et qu’il ne faut plus attendre, mais le lancer dès 2011.
Les études complémentaires qui vont être financées par le Conseil Général de l’Isère et la Région Rhône Alpes devraient démarrer très rapidement. Il faut que le Conseil Général du Rhône, le Grand Lyon et le SYTRAL y soient associés pour que ce projet soit partagé par tous les acteurs et qu’enfin sa gouvernance se mette en place.
Cette étude du cabinet Inddigo Altermodal apporte des informations concrètes et exploitables. Les études complémentaires financées par le CG 38 et la Région RA peuvent être finalisées dans les 6 mois et devraient permettre de lever tous les doutes techniques et financiers qui pourraient rester.
Nous ne pourrons pas accepter que ces études 2011 rejoignent celles déjà menées en 2004 et 2007 qui n’ont abouti à aucune décision, laissant penser à la population qu’elles n’ont été menées que pour la faire patienter. Nous espérons encore que les élus du territoire puissent enfin s’unir autour d’un projet majeur, en mettant de côté toutes les querelles partisanes ou d’égo qu’ont un petit nombre d’entre eux, bloquant toute prise de décision. Il ne faut pas oublier qu’il y a énormément de projets de ce type dans l’Isère, la Région RA ou le pays et, qu’au-delà de leur viabilité technique et financière, seuls ceux portés avec ténacité par l’ensemble des élus avec l’appui de la population pourront aboutir.
Article rédigé par André
Mansiaux